De nouveaux défis émergent dans le monde complexe de la défense antiaérienne, transformant la manière dont évoluent les sécurités nationale et européenne.
Parmi eux : la montée en puissance des missiles balistiques avec un cas récent d’utilisation de l’armée russe dans le cadre de la guerre en Ukraine.
Face à des menaces de plus en plus marquées telles que les missiles balistiques manœuvrables, les missiles de croisière hypersoniques et les véhicules hypersoniques planants, les stratégies traditionnelles de défense s’avèrent souvent insuffisantes.
Quelles sont les dernières avancées en matière de technologies d’interception de missiles hypervéloces et d’innovations européennes sur ces types de missiles? Quels développements récents soulignent l’engagement des pays européens en ce sens ?
Missiles hypersoniques : de quoi parle-t-on et quels sont les enjeux de l’Europe aujourd’hui ?
Un missile hypersonique, dans sa forme la plus basique, est un type de missile qui se déplace à une vitesse hypersonique, c’est-à-dire à une vitesse souvent supérieure à Mach 5, soit cinq fois la vitesse du son. Ce type de missile représente donc une avancée majeure en matière d’armement, tant sur le plan de la rapidité et de la puissance effectives que sur celui de la dissuasion.
Ces missiles utilisent généralement des statoréacteurs ou des moteurs à propergol solide pour atteindre et maintenir ces vitesses élevées.
Si, historiquement, la Chine, la Russie ou encore les USA ont beaucoup travaillé sur ce sujet, l’Europe a été moins active que ces derniers dans le développement de missiles hypervéloces… jusqu’à récemment et à l’exception notable du consortium MBDA avec les missiles ASMP et ASMP-A (Mach 3).
L’un des enjeux majeurs posés par l’existence de tels missiles est leur manœuvrabilité et la prédictibilité actuelle de leur trajectoire (balistique). Du point de vue des systèmes de défense, les vitesses extrêmes des missiles hypersoniques rendent leur interception par les systèmes actuels particulièrement difficile.
Ces derniers doivent être capables de détecter, suivre et intercepter des cibles se déplaçant à plus de 6 000 km/h, ce qui pose d’énormes défis en termes de réactivité et de précision.
Les avancées récentes en matière de missiles hypersoniques
Si les missiles hypervéloces ne sont pas nouveaux, on assiste, depuis 2023 en particulier, à plusieurs développements importants en Europe, en particulier autour de MBDA, acteur majeur de l’industrie de la défense.
- Projet Aquila : MBDA a dévoilé un nouveau concept d’intercepteur de missiles hypersoniques nommé Aquila. Il représente une réponse européenne aux menaces croissantes posées par les missiles hypersoniques, qui peuvent manœuvrer et sont difficiles à intercepter. Aquila, qui est en phase de concept depuis environ cinq ans, est conçu comme un intercepteur endo-atmosphérique (ne sortant pas dans l’espace) et fait partie d’un effort plus large pour développer une capacité de défense contre les menaces hypersoniques en Europe. Le projet implique un consortium dirigé par MBDA, comprenant 19 partenaires et plus de 30 sous-traitants de 14 pays européens. Ce projet est soutenu par des nations partenaires telles que la France, l’Italie, l’Allemagne et les Pays-Bas.
- HYDIS² : le projet Aquila est soutenu par plusieurs pays européens et est le fruit d’une étude de défense hypersonique (HYDIS) qui vise à créer un intercepteur pouvant contrer les nouvelles menaces émergentes.
Le programme Aquila souligne bien le renforcement de la coopération européenne en la matière : il est en partie financé par le Fonds européen de la défense et est lié au programme Timely Warning and Interception with Space-based TheatER Surveillance (TWISTER) sponsorisé par la Coopération structurée permanente (PESCO) de l’Union européenne.
Le coût du programme HYDEF de l’UE, qui couvre la phase de concept pour développer un intercepteur endo-atmosphérique similaire, est estimé à environ 110 millions d’euros sur une période de 36 mois.
Du côté des missiles d’attaque, l’ASN4G fait de plus en plus parler de lui. Successeur de l’ASMP, il est destiné à prendre une place importante dans le cadre du renouvellement de la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire française et sera doté d’un superstatoréacteur. Le projet existe depuis 2014, date à laquelle l’ONERA et MBDA se sont vus confier les études destinées à sa mise au point.
Ariane Group dispose également d’une expertise dans les vols hypersoniques avec son démonstrateur de planeur hypervéloce VMaX.
Vers une nouvelle course aux armements ?
Pour bien remettre ces développements dans le contexte mondial, il est important de noter que le développement de technologies hypersoniques n’est pas limité à l’Europe.
D’autres puissances mondiales comme les États-Unis, la Russie et la Chine, testent également des technologies hypersoniques, ce qui soulève des préoccupations concernant une compétition mondiale croissante pour de telles armes.
Pour donner une idée de l’importance de ce type d’armement dans le monde, “10 des 13 pays disposant des plus gros budgets militaires ont un programme de recherches sur les missiles hypervéloces” (source : CESM).
En conclusion
Les missiles hypersoniques, incarnés par des projets comme Aquila de MBDA et l’ASN4G, marquent une évolution significative dans la défense européenne. Ces développements indiquent non seulement un bond technologique, mais aussi une volonté renforcée de coopération et d’innovation au sein de l’Europe.
Le missile hypersonique représente une avancée notable par rapport aux systèmes de missiles classiques. Avec des vitesses pouvant dépasser Mach 5 et une manœuvrabilité améliorée, ils posent des défis nouveaux et importants en matière de détection et d’interception, nécessitant des solutions défensives innovantes comme le projet Aquila. Ce dernier, soutenu par un consortium de pays européens et financé en partie par le Fonds européen de la défense, souligne l’importance croissante de la collaboration européenne dans la technologie de défense.
Parallèlement, le développement de l’ASN4G témoigne de l’engagement de l’Europe à maintenir une dissuasion nucléaire crédible. L’ASN4G, avec ses capacités hypersoniques avancées, est destiné à jouer un rôle crucial dans la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire française, remplaçant l’ASMP et renforçant la position stratégique de la France.
Cependant, ces avancées surviennent dans un contexte mondial de compétition croissante dans le domaine des armes hypersoniques, impliquant d’autres puissances majeures comme les États-Unis, la Russie et la Chine. Cette dynamique soulève des questions sur une éventuelle nouvelle course aux armements et sur l’équilibre stratégique mondial.
Ainsi, alors que l’Europe fait des pas en avant significatifs dans le développement de missiles hypersoniques, ces progrès doivent être compris dans un contexte géopolitique plus large, marqué par l’innovation technologique et la nécessité d’une approche collaborative et stratégique en matière de défense.
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(c) image principale : MOURAD CHERFI / MBDA